1860 / 1911

 

      Extrait de LA MORT A VENISE

   Gustav von Aschenbach était de taille un peu au-dessous de la moyenne, brun, le visage entièrement rasé. Sa tête paraissait assez forte par rapport au corps plutôt délicat. Ses cheveux ramené en arrière, clairsemés au sommet de la tête, drus et grisonnants aux tempes, encadraient un front haut, raviné et que l'on eût dit couvert de cicatrices. Le ressort doré de verres non cerclés entaillait à la racine un nez aquilin et ramassé. Ses lèvres à l'ordinaire se fermaient mollement, ou bien elles se contractaient, rétrécissant soudain la bouche, qu'il avait assez grande; ses joues maigres étaient creusés de sillons et à son menton bien fait on voyait une fossette. On eût dit que le destin dans de graves occasion avait laissé sa griffe sur cette physionomie volontiers inclinée avec une expression de souffrance, alors qu'elle ne devait qu'à l'art un modelé qui tient ordinairement aux péripéties d'une existence agitée.